La chronique du roman » Juste une ombre » de Karine Giebel

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Tu te croyais forte. Invincible. Installée sur ton piédestal,

tu imaginais pouvoir régenter le monde.

Tu manipules? Tu deviendras une proie.

Tu domines? Tu deviendras une esclave

 tu mènes une vie normale, banale, plutôt enviable. Tu as su t’imposer dans ce monde, y trouver ta place.

Et puis un jour…

Un jour, tu te retournes et tu vois une ombre derrière toi.

A partir de ce jour-là, elle te poursuit. Sans relâche.

Juste une ombre.

Sans visage, sans nom, sans mobile déclaré.;

On te suit dans la rue, on ouvre ton courrier, on ferme tes fenêtres.

On t’observe jusque dans les moments les plus intimes.

Les flics te conseillent d’aller consulter un psychiatre. Tes amis s’écartent de toi.

Personne ne te comprend, personne ne peut t’aider. Tu es seule.

Et l’ombre est toujours là. Dans ta vie, dans ton dos.

Ou seulement dans ta tête?

Le temps que tu comprennes, il sera peut-être trop tard…

Tu commandes? Apprends l’obéissance.

Tu méprises? Apprends le respect.

Tu veux vivre? Meurs en silence…

 

Parut le 8 mars 2012. Éditions Fleuve Noir. 500 pages.

Mon avis :

Cloé est une trentenaire qui réussit tout ce qu’elle entreprend. Vice-présidente d’une agence de publicité, elle brigue avec férocité le poste de Président. En plus, d’une vie professionnelle stimulante, la jeune femme bénéficie d’un entourage affectif solide grâce à Carole sa meilleure amie et à Bertrand, son amoureux, dont elle est très éprise.

Alors que Cloé rentre seule un soir, elle est suivie par un inconnu jusqu’à sa voiture. La jeune femme, persuadée qu’il ne s’agit pas d’un hasard, est traumatisée par l’incident. Malgré les jours qui passent, elle ne parvient pas à se départir de cette angoisse que lui a inspirée l’ombre et se sent épiée chaque minute. Prenant le moindre désagrément quotidien pour une action malveillante de l’inconnu, la jeune femme perd de sa superbe et bascule petit à petit dans la paranoïa. Lorsqu’elle se confie à ses proches pour obtenir leur soutien, ces derniers se détournent d’elle et mettent en doute sa santé mentale.

Alors que personne ne la croit, le commandant Alexandre Gomez vient étayer sa thèse et lui apporte son aide.

 

Karine Giébel a une plume claire et fluide. Le débit est rapide et les pages s’enchaînent sans accrocs. Le récit s’inscrit dans une atmosphère angoissante. Les descriptions des émotions et des visages des protagonistes, plutôt que des décors, nous permettent de mieux ressentir ce climat pesant ainsi que la peur éprouvée par l’héroïne. Dès les premières pages, nous sommes plongés dans une ambiance stressante qui annonce un thriller étouffant. L’auteur parvient à maintenir ce niveau d’angoisse jusqu’à la dernière page.

L’intrigue porte sur le harcèlement de Cloé. On hésite ainsi entre paranoïa et réelle persécution pendant les premières pages de l’ouvrage. Il s’avère rapidement que la jeune femme est réellement harcelée, vient alors le moment de se pencher sur l’auteur de cette persécution. Qui peut lui en vouloir au point de lui faire subir tout cela ?

Le fond du récit est basé sur la maladie, qu’elle soit mentale ou physique. Les protagonistes ont presque tous un lien avec une personne malade ou sont eux-mêmes un peu déséquilibrés. On observe ainsi quels effets peuvent avoir ces maladies sur le psychisme des personnages. Culpabilité, amour et désespoir tourmentent les principaux acteurs du livre.

Ce livre est avant tout un thriller psychologique. L’auteur joue avec nos nerfs autant qu’avec ceux de son héroïne. Malheureusement, on devine plutôt aisément les tenants et les aboutissants de l’intrigue.

Le personnage de Cloé est le plus fouillé. Quoique un peu désagréable, car trop sûre d’elle au début, on la voit évoluer psychologiquement au fil des pages. Le lecteur découvre alors son passé, les failles de la carapace si bien construite et une héroïne qui n’est finalement pas dépourvue de cœur. Ceci allié à la qualité des descriptions des émotions rend cette personnalité humaine, voire sympathique.

En ce qui concerne les autres protagonistes, comme ils jouent tous un rôle, même limité, dans l’intrigue (sauf peut-être Carole), j’aurais aimé que l’on parle un peu plus d’eux. Que l’on approche plus de leurs véritables entités et que l’on découvre les motivations profondes du persécuteur de Cloé. Mais l’auteur n’aborde que la vie du commandant Gomez et ne s’attarde pas sur les autres. Avec ce final qui laisse libre cours à l’imagination une suite permettrait d’approfondir ces personnages et de donner enfin une explication au comportement du bourreau de Cloé.

Pour conclure :

« Juste une ombre » est un concentré d’angoisse et de peur. J’ai beaucoup aimé le style de Karine Giébel. Sa parfaite description de ce que ressent le personnage vous permet de bien entrer dans la peau de l’héroïne et vous met parfois mal à l’aise. À lire pour découvrir les méandres des cerveaux malades et la lente descente aux enfers d’une femme pourtant si sûre d’elle à l’origine.

écrit par Jess