La chronique du roman » L’AGE DES MIRACLES » de Karen WALKER

Et si nos journées commençaient à s’allonger, d’abord de quelques minutes, puis de plusieurs heures, jusqu’à ce que le jour devienne la nuit et la nuit le jour ?

Et si nos journées commençaient à s’allonger, d’abord de quelques minutes, puis de plusieurs heures, jusqu’à ce que le jour devienne la nuit et la nuit le jour ?

Une journée d’octobre apparemment comme les autres, l’humanité découvre avec stupeur que la vitesse de rotation de la Terre a ralenti. Les jours atteignent progressivement 26, 28 puis 30 heures. La gravité est modifiée, les oiseaux, désorientés, s’écrasent, les marées se dérèglent et les baleines s’échouent… Tandis que certains cèdent à la panique, d’autres, au contraire, s’accrochent à leur routine, comme pour nier l’évidence que la fin du monde est imminente. En Californie, Julia, est le témoin de ce bouleversement, de ses conséquences sur sa communauté et sa famille. Adolescente à fleur de peau, elle est à l’âge ou son corps, son rapport aux autres et sa vision du monde changent : l’âge des miracles.

Il est sorti en mai 2012 aux Éditions La Presse de La Cité, 19,90€.

MON AVIS :

L’âge des miracles est définitivement l’un des livres les plus bouleversants que j’ai jamais lus. Malgré le fait qu’on revienne sur le passé de Julia, lorsqu’elle n’avait que 11 ans, la narration est mature, limpide, délicate, pleine de métaphores d’une naïveté touchante. La nostalgie se ressent tout au long du récit, et on comprend qu’il est raconté par une jeune femme qui a conservé du monde, tel qu’elle l’a connu, enfant, un souvenir des plus précis. Assurément douloureux mais précieux.

En nous offrant cette parcelle de sa vie, à l’heure des changements progressifs conduisant inéluctablement la race humaine vers sa fin, elle nous fait cadeau d’un regard émerveillé sur ce qui rythme notre quotidien, pointant du doigt ce besoin vital de régler nos vies au son des horloges. Jusqu’à la dernière ligne, la fatalité plane au-dessus des pages de ce roman, et l’on ne peut s’empêcher de guetter à chaque fin de paragraphe la fin de tout, l’événement qui précipitera le monde dans une obscurité éternelle.

Ce livre est un roman unique, porteur d’un message habilement délivré. L’humain s’adapte, mais il n’est pas tout puissant. Sur la Terre de Karen Thompson Walker, tandis que certains renoncent à s’adapter, d’autres persévèrent. Ainsi nous suivons Julia et sa famille dans ces actes du quotidien auxquels les hommes s’accrochent, conscients que cet allongement des journées n’est pas normal, qu’il augure d’un danger bien plus grand. Les catastrophes se succèdent, les médias et scientifiques tentent de minimiser la situation jusqu’au moment où la planète ne peut plus se voiler la face. S’organise alors un plan de survie face à une terre devenue l’ennemie : infertile, sombre quand les rayons du soleil ne brûlent pas, et même parfois meurtrière.

À côté de ce contexte dramatique, on voit Julia se débattre avec les démons de l’adolescence, notamment ce sentiment d’être incomprise, avant de découvrir son premier amour. Julia et Seth sont touchants, vraiment. Leur relation apporte de la légèreté et un message d’espoir, celui qui laisse à penser que la vie peut continuer. Il est impossible de deviner comment ce roman va se terminer tant les événements se précipitent sans permettre au lecteur de voir plus loin que les souvenirs révélés à chaque page.

Certains pourront reprocher au récit sa lenteur, moi, je trouve au contraire que c’est ce qui en fait sa force. Car grâce à cela, ce n’est pas tant l’épée de Damoclès au-dessus de la tête de l’humanité qu’on perçoit, mais plus sa lente et inévitable descente. On en vient même à percevoir les à-coups a posteriori, mais seulement lorsqu’on a terminé la lecture.

Voici donc un roman jeunesse, qui s’adresse à un large public, et qui marquera les esprits, comme rarement, tant il dépeint une réalité qui pourrait être.

Ecrit par Julie