Chaque matin, c’est le même effroi. La même surprise.
En se découvrant dans la glace, Christine a vieilli de vingt ans. Elle ne connaît ni cette maison, ni l’homme qui partage son lit.
Et chaque matin, Ben lui raconte. L’accident. L’amnésie…
Ensuite, Christine lit son journal, son seul secret. Et découvre les incohérences, les questions, tout ce qu’on lui cache chaque matin, posément. Peut-être pour son bien… Peut-être pas.
Cet ouvrage a reçu le prix SNCF du Polar 2012
Il sera réédité le 7 mai 2013 aux éditions Pocket, 7,60€, 480 pages.
Mon avis:
« Avant d’aller dormir » est un roman qui fait réfléchir sur ce que l’on prend pour acquis : la mémoire. On se dit tous qu’on aura le temps de faire face à ses défaillances quand on sera plus âgés avec Alzheimer, notamment. Eh bien, c’est troublant de s’y retrouver confronté maintenant à travers les yeux de Christine, cette femme si réaliste et honnête qu’on s’attache à elle dès le début. Ce livre est écrit avec une minutie poussée à son paroxysme, à tel point qu’on ne voit pas les choses venir. Car n’oublions pas, il est étiqueté sous le terme « thriller », et ce n’est pas pour rien. Le suspense reste entier jusqu’au bout, et on avale les cinquante dernières pages avec une frénésie effrayante.
Christine a donc la quarantaine, un mari, une maison plutôt agréable. A priori, tout va bien. Sauf qu’en réalité, chaque matin, elle se réveille persuadée qu’elle est encore une étudiante. Christine souffre d’une incapacité à stocker de nouveaux souvenirs provoquée par un accident de voiture, dont elle a été victime il y a environ vingt ans, et cet événement a également affecté sa mémoire plus lointaine. C’est littéralement la pêche aux souvenirs, et ça ne mord pas beaucoup…
Nous suivons donc le quotidien de cette femme dépendante de son mari, qui doit construire son identité par rapport à ce qu’il lui dit, et intégrer le nécessaire pour survivre à une nouvelle journée grâce à une indépendance toute relative. C’est terrible de devoir la voir apprendre son malheur au fil des jours, encore et encore, on ne s’y fait pas, et cela empire quand nous, lecteurs, nous commençons à en savoir plus qu’elle sans pouvoir lui dire quoi que ce soit, alors qu’on en meure d’envie. Cette partie où Christine est totalement perdue ne dure pas longtemps, car très vite, un homme qui se prétend médecin la contacte pour lui dire qu’ensemble ils ont débuté une thérapie pour l’aider à fixer les souvenirs. Pour cela, il lui a conseillé d’écrire un journal.
Au fur et à mesure que celle-ci consigne tous les faits quotidiens et souvenirs rapportés par son mari et son entourage, Christine se rend compte que pas mal de choses ne collent pas. Au départ, ce ne sont que des petits accros qu’elle tente de justifier, puis ces accros se transforment en véritables fissures qui réduisent de nouveau sa vie à l’état de puzzle.
Ce n’est pas qu’un livre « technique » qui aborde la mémoire sous un angle scientifique. Non. C’est un livre humain dans ce qu’il y a de plus personnel : les sentiments qu’on se force à avoir, espérant qu’ils refassent surface d’eux-mêmes, le corps qu’on doit redécouvrir et accepter, le deuil d’un passé qu’on ne pourra jamais pleinement reconstituer et celui d’un avenir qui demeurera à jamais inaccessible faute de pouvoir s’y projeter.
C’est un roman unique de par le sujet qu’il traite et de par cette honnêteté dans la perception des émotions. On s’attend à tout moment à ce que Christine craque complètement au point de vouloir en finir. On marche sur la corde raide la concernant, mais également avec ses proches qu’on case tous plus ou moins dans la catégorie des menteurs, puis des coupables… Prenez le temps de lire ce livre, de vous immerger complètement, vous serez bluffé.
Ecrit par Julie