La chronique du roman « Meurtres pour rédemption » de Karine Giebel

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Marianne, vingt ans. Les barreaux comme seul horizon. Perpétuité pour cette meurtrière.

Indomptable, incontrôlable, Marianne se dresse contre la haine, la brutalité et les humiliations quotidiennes.

Aucun espoir de fuir cet enfer, ou seulement en rêve, grâce à la drogue, aux livres, au roulis des trains qui emportent l’esprit au-delà des grilles. Grâce à l’amitié et à la passion qui portent la lumière au cœur des ténèbres.Pourtant un jour, une porte s’ouvre. Une chance de liberté.

Mais le prix à payer est terrifiant pour Marianne qui n’aspire qu’à la rédemption…

Parut le 8 mars 2012. Éditions Pocket.

Mon avis :

Le récit commence dans la maison d’arrêt où est incarcérée Marianne de Gréville, tout juste vingt-et-un ans. La jeune femme est emprisonnée à perpétuité pour un triple homicide depuis ses dix-sept ans. Dans le milieu du banditisme, Marianne est une célébrité, elle est donc maintenue à l’isolement afin de ne pas provoquer de débordement ou d’altercation avec les autres détenues.

Malgré les horreurs qu’elle a commises, la jeune femme attire la sympathie de Justine, une surveillante, et de Daniel, le gradé du bâtiment des femmes. Commence alors le récit de la survie en prison et des interactions humaines entre les différents « habitants » de cet univers. Entre les sévices, les brimades, mais aussi l’amitié et la solidarité, on observe la vie carcérale quotidienne.

Après deux ans passés dans cette maison d’arrêt, Marianne reçoit la visite de trois hommes qui lui proposent de retrouver sa liberté en échange d’un service bien particulier… Mais Marianne, déjà assaillie par la culpabilité, est réticente à commettre l’irréparable.

Karine Giébel a une plume claire. Son récit est fluide, parfois lapidaire ou contrarié, en accord avec l’humeur du narrateur.

Le contraste entre les émotions ressenties par Marianne donne au livre une dimension étrange, une atmosphère bien particulière, entre mélancolie et allégresse. Bien que le fond soit très noir, l’espoir et la joie des bonheurs simples (sentir l’odeur de l’herbe coupée ou de la forêt après la pluie) exprimés par l’héroïne allègent considérablement l’ambiance sans toutefois nuire à la consistance du récit. Tout cela crée une réelle intimité avec le personnage.

Les descriptions du monde pénitentiaire et les scènes de violences nous permettent de nous plonger au cœur du milieu carcéral avec angoisse et instillent une sensation de malaise chez le lecteur. Les règles de la société extérieure ne s’appliquent plus là-bas et tout devient alors possible.

L’auteur trace ainsi un portrait bien noir du milieu carcéral français, mais aussi de l’être humain. En effet, les représentants de l’autorité sont bien souvent aussi vicieux et sadiques que les détenues, voire même plus. Le lecteur se pose alors de nombreuses questions sur nos systèmes judiciaires et pénitentiaires ainsi que sur la réinsertion des prisonnières.

Karine Giébel montre avec ce récit sa très grande maîtrise des émotions. Ce livre vous émeut autant qu’il vous enrage. Ses descriptions de la solitude, de la culpabilité, de la peur, mais aussi de la tendresse et de l’amitié sont réellement bouleversantes et ne laissent pas indemnes.

Le livre ne possède pas d’intrigue à proprement parler, on sait qui fait quoi et pourquoi. On suit plutôt le cours de la vie de l’héroïne, son évolution, la maturation de son jeune esprit vers une certaine sagesse et la recherche du bonheur.

La personnalité de Marianne est très approfondie. On apprend à connaître et à comprendre cette meurtrière grâce à des rétrospectives de son passé et grâce à l’exploration de ses sentiments et de son ressenti au fil des évènements qu’elle vit. L’auteur parvient ainsi à nous faire aimer cette tueuse qui pourtant devrait nous inspirer de l’horreur. Cette boule d’agressivité et de violence n’aspire à rien d’autre qu’à la liberté, au pardon et au bonheur de se lover dans les bras de l’être aimé.

Daniel, l’un des autres protagonistes, a la lourde responsabilité de maintenir Marianne calme. N’ayant d’autres moyens de pression, Daniel va exercer un chantage sexuel sur Marianne : du sexe contre clopes et cames. Mais au fil des pages, ses sentiments pour Marianne vont changer. Daniel va alors lui offrir un peu de liberté. Il va faire découvrir l’amour à Marianne. On contemple ainsi l’évolution de leur relation et l’effet que cet amour en milieu hostile a sur l’un et sur l’autre.

Pour conclure :

 Comment rendre justice à un livre qui m’a tellement touchée en quelques lignes !?

Cette histoire dense est un réel chef d’œuvre, c’est un vrai coup de cœur ! Malgré un volume plus qu’imposant, je n’ai pas vu le temps passer. Je n’ai pas cessé d’y penser. Je n’ai pas été tranquille avant de l’avoir terminé.Ce livre d’une noirceur suprême est avant tout une ode au pardon, à l’amour et à la liberté. Tant d’émotions et d’humanité au milieu de toutes ces brutalités et méchancetés ne peuvent pas laisser de glace.

J’espère que vous donnerez sa chance à ce livre, car il en vaut la peine.